Selle de dressage synthétique ; Sangle courte ; Tapis de selle ; guêtres cuir ; Protège-boulet cuir.
Déjà deux jour que je suis arrivée ici. Je n’ai pas vraiment eue le temps de visiter ni de passer du temps avec Joke. Honte à moi. Il faut dire qu’avec toute les formalités à remplir, à rendre… J’ai passé plus de temps dans la ville qu’à la Cuadra Del Eclipse.
Soudain impatiente de visiter cette écurie si particulière, afin plutôt de m’amuser avec Joke, je me levai de ma chaise, rangea le dessin que je venais de griffonner. Oui enfin griffonner ça c’est ce que je pense hein. Parce que pour vous cette fille, assiseà même le sol, regardant un petit bassin d’eau est un dessin magnifique. Enfin bref, pour moi, le dessin n’est qu’un passe-temps, une manière d’échapper à la tristesse et au tourment qui me ronge chaque jour.
Je disais donc, soudain impatiente d’aller voir mon cheval, je me levai de ma chaise, enfilai mon pantalon de cheval. Je rassemblai mes longs cheveux châtains en un chignon désordonnés, me regardai une dernière fois dans le miroir et sortit de mon appartement. Oui je soigne quand même mon apparence. Ma mère disait toujours qu’il valait mieux se montrer féminin que garçon manqué. Ce n’est peut-être pas important pour vous mais comprenez que lorsque l'on perd sa mère, on s’accroche à tout ce qui a un lien avec elle. Si je suis triste ? Bien sûr. Vous ne le voyez pas ? C’est que vous ne connaissez pas la tristesse. La vraie.
Dehors, l’air du petit matin était frais. Je regrettai déjà de ne pas avoir pris de veste. « Merde, il caille dehors ! »pensais-je. Je me mis à prier que l’air chaud d’une écurie puisse venir à bout de mes frissons. Merde. J’avais complètement oublié que j’avais pris un box extérieur. Bon pour la chaleur on repassera. J’arrivais près d’un grand bâtiment où le bruit du mâchouillis d’un cheval mangeant de la paille et les souffles calmes des autres, surement endormis. Un sourire niais se dessina sur mes lèvres mais s’effacai immédiatement. Je ne veux pas que les gens me prennent pour une niaise ! Joke qui avait déjà sentit l’odeur des biscuits maison dont j’avais le secret, hennit bruyamment. Il s’agita dans son box, donnant de grand coup de pied dans la porte.
«Oui beau gosse, je suis là ! »
J’ouvris la porte du box et ordonnai à mon cheval de reculer. Ce glouton a pour manie de sortir de son box dès que la porte était ouverte ou même mal fermé. Oh ne vous inquiétez pas , il n’est jamais allé très loin. Monsieur n’est pas très doué pour jouer à cache-cache. La seule cachette qu’il connait, c’est la réserve de foin !
Après un bon pansage, plutôt mouvementé il faut dire, puisque le grand baie a visiblement envie de s'amuser aujourd'hui, je le sellai et le sortit du box. J'avais l'intention de le détendre un peu, histoire qu'il ne soit pas trop rouillé pour les prochains jours de travail.
La Cuadra Del Eclipse est une écurie vraiment gigantesque et moderne. Émerveillé, j'avançai sans vraiment savoir où j'allais, Joke me suivait en trépignant d'impatience. Je mis peu de temps à me rendre compte que je ne savais pas où se trouvais le manège. Plus tête en l'air que moi, y a pas je pense. Et toi Joke, n'en remet pas une couche en me poussant avec ta tête.
Les bruits de pas qui résonnaient derrière moi me rassuraient quelque peu. Cette personne allait pouvoir venir m'aider. Je me retournai et tomba nez à nez avec un jeune homme aux cheveux brun, plutôt séduisant.
Je ne m’attendai pas vraiment à le voir si près. Un petit cri de surprise m’échappa et Joke, en tout bon étalon, coucha les oreilles et se rapprocha de moi. Le jeune homme recula d’un pas, et passa une main dans ses cheveux bruns en souriant.
« Euhm. Salut. Tu me sembles un peu perdue ? Tu cherches quelque chose ? Je peux sûrement t’aider. » dit-il d’une voix amicale.
Enfin, quelqu’un avait répondu à ma prière. Je ne suis pas vraiment croyante, mais quand on est désespéré on se met souvent à prier qu’une chose bien nous arrive. Cela marchait la plupart du temps. Joke, qui n’appréciait pas vraiment qu’un humain, autre que moi, soit près de lui, se mit à souffler bruyamment, tout en trépignant. Et le fait que cet inconnu soit un homme n’arrangeaient pas les choses. Au moins, je sais ce que je dois travailler avec lui.
« Bonjour. Oui, effectivement. Dur dur d’être nouvelle. Je pensais aller détendre mon cheval dans un manège mais je ne sais pas où il se trouve… » dis-je d’une voix timide.
Ouai je suis timide. Et alors ? Je n’ai jamais tenu une vraie conversation avec quelqu’un depuis… Depuis la mort de mes parents.
Lorsqu’il entendit le son de ma voix, un petit sourire au coin se dessina sur son visage. Ah oui. J’oubliais. Oui j’avais oublié le fait que je n’ai pas toujours habité en France. Que les quelques années passées en Angleterre ont suffi pour faire apparaître une douce note anglaise dans ma douce voix. Monsieur était français, monsieur avait un accent de qualité. Mais ne le jugeons pas trop vite. Peut-être qu’il est sympathique sous ces airs de frimeur avec ces cicatrices. Quoi ? Moi je matte ? Noon…
Il fit un pas et me montra d’un geste de la main un bout de toit qui surplombait l’écurie. Mais qu’est-ce qu’il a à sourire tout le temps lui ? Faut arrêter la drogue !
« C’est là-bas. On voit le toit d’ici. Il faut passer devant le rond et l’entrée est sur la gauche. »
Il me regarda et fronça légèrement les sourcils. Quoi ? Oh oui merde. Instinctivement j’avais reculé, je m’étais légèrement recroquevillé sur moi-même. Je tenais fermement les rênes de Joke. Me reprenant, je secouai discrètement la tête et me reconcentrais sur les paroles du jeune homme. Bah enfaite ce n’était pas si compliqué que ça. Je suis vraiment bête. Soudain, je sentis sa main passée derrière mon dos. Je me raidis, me tenant aussi droite qu’un fil de fer.
« Si tu veux être sûre de ne pas te perdre, je peux t’accompagner ? »
Ok. C’est quoi ce mec ? Il s’est cru dans le monde des bisounours ou quoi ? Ah moins que ce ne soit un dragueur fini. Et dans ce cas-là vraiment fini.
« Euh… O-oui. Ce serait gentil de ta part. »
Attends mais je viens de dire quoi là ? Cette journée risque d’être… Passionnante.
Devant ma réaction, il passa devant moi et prit la direction qu’il m’avait indiqué pour ce rendre au manège. Je le suivis sans dire un mot. Oh je ne suis pas de nature timide, mais quand on se renferme sur nous même et que les seuls conversations qu’on est eu avec une personne sont « Bonjour, une baguette s’il vous plait. » ou même « Pardon. », c’est difficile d’engager une discution normal. Perdue dans mes pensées je ne remarquai pas que nous étions arrivé à destination. Le brun se retournai et me dit :
« Voilà. L’entrée est là-bas. Je te laisse passer et je fermerai derrière toi si tu veux. Ah ! Au fait, si tu as besoin de quoi que ce soit, je m’appelle Luka. »
Je levai la tête et le regarda. Il était toujours souriant. Alors, enfin, je décidai de prendre mon courage à deux mains et de le remercier. Il avait l’air gentil en fin de compte.
« Merci beaucoup Luka. » Dis-je en souriant.
Je passai devant lui avec Joke et pénétra dans le grand manège. Spacieux, moderne, décidément cette écurie avait tout pour plaire. Je plaçai Joke au centre du manège, resserrai sa sangle, descendis les étriers et flattai doucement son encolure. Je me retournai et vis Luka, assis sur le parre botte du manège.
« Ca t’ennuie si je vous regarde un peu ? J’aimerai bien vous voir travailler tout les deux. D’ailleurs, il s’appelle comment ? »
Je me mis en selle rapidement et me rapprocha de lui. Joke, soudain plus calme, s’approchai du jeune homme sans montrer signe de méfiance.
« Non pas du tout. Je ne vais rien faire d’extraordinaire, juste le détendre un peu, le voyage a été long pour lui. Il se nomme Joke, Joke in Wonderland. Et moi c’est Ambre, enchantée. »
Sans attendre sa réponse, je m’éloignai au pas et enchaînai de petit exercice. Incurvation, contre incurvation, de petit diagonale où je forçai Joke à allonger son pas. Il répondait bien, j’espérai qu’il reste calme toute la séance.
Après une bonne détente au pas, Joke passa au galop. Je ne le retiens pas, il connaissait la détente par cœur. Je me mis en équilibre sur mes étriers chaussés longs. Le baie galopait calmement à l’intérieur de la piste, mes bras écartés afin que Joke puisse descendre l’encolure et ainsi libérer et place son dos. Après un tour je changeai de mains puis repassa au trot. J’étais dans ma bulle, accompagnant Joke dans son doux ballet. J’avais complètement oublié que j’avais un spectateur aujourd’hui. Mon cheval, posé sur le mors, s’incurvait naturellement. Il se détendait petit à petit, rendant notre détente encore plus harmonieuse. Je lui fis faire un cercle suivit d’un huit de chiffre, pour changer un peu puis je le repassai au pas. Doucement, Joke descendit l’encolure et renifla le sable jaunâtre du manège. Je le laissai souffler un moment puis au moment de repasser au galop, une voix me sortit de mon petit nuage.
« Ca fait longtemps que tu as Joke ? »
Je levai soudainement la tête. Joke qui avait engagé sa première foulée de galop se stoppa net, encré dans le sol. Il avait senti mon changement d’attitude et étant très réceptif, il se tendit, tout comme moi. Luka venait de poser une question qui m’avait fait l’effet du claque. Répondre à cette question voulait dire recaser le passé. Mon passé heureux. Quand tout allait bien. Quand ma mère avait retrouvé sa gaité d’antan. Quand Franck m’apprenait à monter à cheval. Quand mon frère était encore là. Je n’avais jamais raconté ma vie à qui que ce soit. En même temps à qui aurais-je pue la conter ? On dit qu’exprimer nos douleurs nous permet de s’en libérer. Mais puis-je vraiment le dire à un inconnu ? Je n’en savais rien. Reprenant mes esprits, je caressai tendrement Joke. Il se détendit et tourna la tête vers moi, comme pour me dire « Tu m’as fait peur. Tout va bien ? ».
« Oui mon beau, tout va bien. »
Il soupira puis avançai doucement. Je levai la tête et regardai Luka.
« Je… J’avais 13 ans. Il m’appartient depuis sa naissance. »
Les larmes me montèrent subitement aux yeux. Je tournai la tête, faisant mine de regarder une cavalière qui menait son cheval gris au pré. J’espérai qu’il ne m’avait pas vue. Il m’avait assez aidé pour aujourd’hui.