Ce matin, j'avais bataillé avec une Imagination très peu d'accord avec ma résolution de la laisser à la maison. Ayant finalement gagné, j'arrivais à l'écurie sans avoir à surveiller ma chienne, et mine de rien je me fis la réflexion que c'était fort agréable de temps en temps.

Je m'approchais de l'allée où logeaient mes trois chevaux, poussant doucement la porte et la refermant soigneusement derrière moi. Depuis mon arrivée en France, j'avais décidé de laisser Virgule dans un box, en espérant que le fait de rester enfermé le pousse à venir un peu plus vers moi. J'en doutais fortement, mais qui ne tente rien n'a rien.

Je me postais devant le box de mon beau pie et lui offrit un sourire. Mine de rien, malgré le fait que j'avances à deux à l'heure avec lui, je m'étais attachée à cette boule de stress dès que j'arrivais dans son périmètre de sécurité. Et je m'étais fait une fierté personnelle de réussir à le faire redevenir comme avant.
- "Bonjour, Virgule. Alors, la France te plaît ?"

Je m'approchais de la porte du box et sortit trois morceaux de pain de ma poche. Je les déposais soigneusement alignés sur le haut en fer , bien au milieu, posés bien en évidence. Au cas où il n'aurait pas entendu le crissement du pain dur, ce dont je doutais cependant fort.
Je me reculais d'un pas, arrimais mes mains dans mon dos et l'appelais d'une voix toute petite, presque timide.
- "Virgule ? Tu viens manger mon beau ?"

Je regardais, presque tendue, mon grand Cob réagir. Je fus ravie de voir qu'il ne se tapissait pas de peur au fond de son box en me voyant arriver, et je me fis à le fixer les yeux dans les yeux.
Je détournais mon regard vers son museau lorsqu'il s'approcha de la porte, et le vit avec un sourire se débrouiller pour manger son bout de pain à l'abri du box. Me hissant sur la pointe des pieds, je ne parvins pourtant pas à voir grand-chose, aussi je me remis à plat sur le sol.

Je glissais le plus doucement possible ma main dans ma poche, la collant à mon corps pour éviter le plus possible d'effrayer Virgule. Je sortis un morceau de pain tout en le rassurant de la voix.
- "C'est biiiiiien mon grand. Tu en veux encore ?"

Je déposais la friandise sur la porte, avec les deux restantes. Plus il acceptait de venir les chercher près de moi, plus il en serait récompensé. Pour le moment, je ne devais être qu'un distributeur de pain à ses yeux, mais si j'arrivais déjà à ne pas l'effrayer par ma simple présence, ce serait très appréciable.
- "Allez, Virgule. Tu sais bien que je ne te ferais jamais de mal. Je suis là pour m'occuper de toi, tu te souviens ?"

Visiblement, cette fois-ci, j'étais trop près de lui pour qu'il parviennes à supporter ma présence. Il lorgna un instant sur le pain, avant de hocher la tête, et de finalement manifester son mécontentement à grands coups de sabot. Je me redressais pour le gronder, car je savais qu'il fallait qu'il comprenne immédiatement qu'il n'avait pas le droit d'utiliser sa force pour obtenir quelque chose. Sinon, il pourrait vite en devenir dangereux.
- Non, Virgule ! Pas de coup de sabot. Si t'es pas content, tu n'as qu'à venir chercher ce pain. Je ne bouge pas.

Je le laissais encore un instant lorgner sur le pain. J'étais encore à un bon mètre de la porte, j'estimais ça relativement surmontable. De toutes façons, s'il ne venait pas, je ne lui ferais certainement pas le plaisir de reculer. Le laisser gagner et le récompenser de sa mauvaise conduite par des morceaux de pain pratiquement offerts ? Non, certainement pas ! Je voulais lui réapprendre à faire confiance à la main de l'Homme, mais sans le laisser prendre de mauvaises habitudes.
- "Allez, mon grand. Je reste là, et mes mains sont cachées. Tu penses que tu vas pouvoir venir chercher ce pain ?"