Stress. Miranda inspira discrètement un grand coup, puis redressa ses épaules. Elle leva les yeux sur le grand restaurant devant lequel elle se tenait. La salle était encore presque déserte, mais les lumières festives bougeaient déjà, et la musique était mise à fond.

Stress. Elle qui n'avait pas l'habitude des fêtes, elle ne les affectionnait pas particulièrement. Mais elle aimait tout de même passer des heures à hésiter entre des tenues, qui finalement se ressemblaient toutes. En fait, la jeune fille s'amusait plus à préparer la fête que pendant la fête elle-même. Car oui, plutôt que de se déhancher sur la piste, Miranda préférait rester dans son coin avec ses amies, si possible près du buffet. Sauf que là, elle n'avait que le buffet, puisqu'elle ne connaissait personne. Et ça, c'était stressant.

Stress. Le regard des autres. Que penseront-ils d'elle? Décideront-ils de l'ignorer ou au contraire de la fixer avec des yeux la jugeant de la tête aux pieds? La timide étudiante n'en menait pas large, et l'espace d'un instant, l'idée de rentrer au haras lui effleura l'esprit. Mais non. Elle devait entrer, tenter de sociabiliser un peu pour apprendre à mieux connaître ses camarades et pourquoi pas se faire des amis. Elle frissonna à cette idée : elle n'avait jamais été douée pour engager la conversation, et si l'autre ne faisait pas le premier pas, elle ne parlait jamais. Alors les chips seraient-elles ses seules compagnes durant le bal? Un petit soupir lui échappa et elle se mordit la lèvre inférieure. Non, cela ne devait pas se passer comme ça, il fallait qu'elle positive.

Nerveusement, Miranda lissa le bas en satin recouvert de mousseline de sa petite robe noire et baissa les yeux sur ses chaussures. De simples escarpins à talon, à lanières argentés. Que du classique, elle ne voulait pas se faire remarquer. Se fondre dans le décor, c'était sa spécialité. Aussi, elle s'était appliquée à lâcher ses cheveux, et à se maquiller presque uniquement les yeux, toujours pour ne pas en faire trop. Il ne fallait pas faire mauvaise impression dès le premier bal auquel elle assistait. Non, surtout pas.

Stress. Il était temps pour elle d'entrer dans ce restaurant. Le vent frais de décembre la fit frissonner. Elle fit un pas, puis deux, puis laissa ses pieds la porter jusqu'à l'intérieur, où elle ôta son gilet afin de le confier aux vestiaires, découvrant les broderies et les quelques perles fixées sur le buste de sa robe. Une mousseline noire drapait son épaule gauche tandis que la droite était dénudée. Rien qui puisse la démarquer de Mademoiselle-tout-le-monde. Elle n'avait pas pris la peine de mettre des accessoires, sa robe étant suffisamment décorée selon elle.

La jeune fille prit brusquement conscience qu'il ne lui restait plus qu'à entrer dans la grande salle, puis à trouver un petit coin discret d'où elle pourrait avoir une vue d'ensemble. Stress. La musique bourdonnait dans ses oreilles, ce tube qu'elle avait écouté tout l'été. Il devait donner l'envie de danser à n'importe quelle personne normale, mais dans l'état actuel de Miranda, sa seule envie était de déguerpir. Mais elle tint bon.

Tu peux le faire. Tu dois le faire.

C'était si stupide. Elle était certainement la seule personne à avoir une énorme boule au ventre, rien qu'à l'idée de pénétrer dans cette salle. Elle marcha la tête baissée et une fois la porte franchie, elle la releva, scrutant les alentours rapidement à la recherche de tranquillité. La pièce était presque vide, ce qui ne la rassura qu'à moitié. Soudain, elle se rendit compte qu'elle se tenait en plein sur la piste de danse, bien sous les projecteurs. La panique s'empara d'elle et elle s'empressa d'aller se réfugier près du rassurant buffet. Au moins lui, il ne la jugeait pas.

Elle regretta amèrement de ne pas avoir pris la peine de chercher un cavalier. Au départ elle ne comptait pas se rendre au bal, dont elle avait tout simplement ignoré l'existence. Mais plus la date se rapprochait, plus Miranda s'était dit que ce serait là l'occasion de rencontrer des gens. Puisqu'elle était encore toute nouvelle ici, elle ne connaissait personne. Et alors pourquoi ne pas avoir cherché un cavalier à ce moment là? Tout simplement par peur de l'inconnu. Du coup, elle se retrouvait seule, adossée au buffet à se morfondre dans de sombres pensées.

Cela ne faisait même pas une minute qu'elle était entrée et déjà, elle se sentait terriblement mal... Finalement, était-ce une bonne idée de venir?