Marteen est comme un grand mystère pour moi. Cela fait de nombreuses séances que nous passons ensemble mais le jeune homme reste imperturbable, incapable de se livrer à moi directement. Cependant, sans le vouloir, quelques anecdotes se sont échappées de ses lèvres me permettant de le connaître mieux.

Commençons par le début et l'histoire de sa famille. M. Stuz est un heureux propriétaire d'une écurie en Allemagne, cette écurie est alors spécialisée dans les jeunes chevaux et leur travail pour la commercialisation. C'est une écurie de renom qui n'a plus son nom à faire. Lors d'une compétition à l'étranger, il rencontra Samantha qui deviendra la mère de Marteen.

Les deux parents n'eurent qu'un enfant, le travail à l'écurie leur prenant déjà pas mal de temps, ils ne voulaient pas négliger leur fils.

Une famille aimante et aisée, tout aurait du bien se passer pour le jeune Marteen. Régulièrement il suivait son père aux différents rendez-vous du gratin de la haute société Allemande mais il faut souvent mis à l'écart, tout comme sa mère. Voyez-vous les étrangers n'étaient pas fortement appréciés par la population. A l'école, ce fut de même, et Marteen se retrouva souvent mis à l'écart et réprimandé injustement par ses professeurs.
L'enfant grandit vite une animosité envers les humains et une solitude qu'il exacerba avec la lecture et en se réfugiant dans sa bulle : dans l'écurie.

Très vite il est devenu un très bon cavalier faisant preuve d'une extrême patience et d'un instinct sans failles près des chevaux. Mais son expérience scolaire ne s'arrangea pas. Battu par les autres élèves, il se sentit alors de plus en plus désabusé mais n'osa rien dire à ses parents, sachant sa mère déjà victime du même racisme. Il continua donc à aller en cours, développant des stratégies de survie comme arriver en dernier en classe, se cacher dans les toilettes pendant les pauses et courir.

Toutefois, une fois à cheval, sous sa bombe, personne ne le reconnaissait et les victoires dans les concours l'ont fait grandir et il a été reconnu d'un certain groupe de personne comme un bon cavalier. Assez polyvalent, sur ses poneys, Marteen a su briller en obstacle, en cross et surtout en dressage. Ayant créé un lien depuis très jeune avec le monde équin, il est doté d'un ressenti fiable qui lui donne les meilleures qualités qui puisse exister pour un cavalier.

Une fois le bac passé, il décida de dire la vérité à ses parents et d'arrêter les études. Sa mère fut détruite par cette révélation et décida de rompre et de retourner au pays. Marteen refusa de la suivre, le départ de sa mère rendit fortement triste le jeune homme qui voyait, en elle, la seule personne qui pouvait le comprendre.

Mais l'amour des chevaux étaient trop forte pour le métisse qui continua à travailler aux côtés de son père à l'écurie. Il fit une petite formation de débourreur en alternance, qui fut facilement validée, et continua de monter les chevaux de l'écurie en tant que cavalier pro.

Si le jeune homme commençait à avoir de la reconnaissance et à se reconstruire, quelques années plus tard, un nouveau coup du destin le fit chavirer. C'est à ce moment là que je l'ai retrouvé, perdu et ne sachant retrouver la lumière de sa vie.

Son père fut diagnostiqué d'un cancer. Ses forces le quittèrent rapidement et il devint évident qu'il devrait bientôt léguer l'écurie. Bien entendu, son fils unique devait être son successeur mais Marteen n'était pas près. Le jeune homme de 28 ans encore puceau et qui n'arrivait pas à parler aux inconnus fut alors paniqué à l'idée de devoir gérer les affaires de son père. Il commença alors à prendre des joins puis passa à la morphine : beaucoup plus puissant, afin de s'évader des responsabilités.

Son père l'apprit, bien évidemment, et m'envoya ce jeune homme qui n'ouvra guère la bouche dans mon cabinet. Il fut soigné, avec patience, de sa nouvelle addiction, bien que je sois certaine que parfois le jeune homme retombe dedans. Puis nous décidâmes d'un milieu : un an de césure loin de son père pour que le jeune homme trouve sa voie et devienne plus autonome.

C'est pourquoi j'écris ce résumé. Marteen part demain pour l'Ecosse. Je souhaite que ce dossier disparaisse et que le cavalier que je connais reste en bonne santé.