Cela faisait un mois qu’Elsa allait voir Spontaneous Me. Elle commençait à la connaître : de nombreux sursaut quand il s’agissait du toucher, une attitude souvent tendue, mais elle avait surtout un cœur en or. Elsa l’appréciait – l’aimait – de plus en plus. Elle n’avait finalement pas encore commencé à réellement travailler avec elle, et c’était pour le mieux. Plus elle la connaitra quand elles travailleront ensemble, mieux cela se passera.

Mais la jument n’était pas la seule à avoir chamboulé le quotidien de la jeune femme. Man, un chiot berger allemand, avait rejoint la troupe des rejetés de la société. Elsa ne pouvait pas ne pas le prendre : c’était elle, mais en chiot. Il lui ressemblait tellement que cela lui avait fait beaucoup de peine. Et puis, qui de mieux placer pour comprendre un chiot qui ne trouve pas sa place, qu’une fille qui n’en a pas elle non plus ?

C’est donc avec le chiot dans les bras qu’Elsa s’est rendue à l’écurie ce jour-là. Son nouvel appartement se trouvait à a peine une demi-heure de transport de Cuadra, donc ni elle, ni le chiot, n’avait eu à subir l’anxiété de la foule trop longtemps. Cela a aussi permis à la rousse d’arriver plus tôt à l’écurie : à l’ouverture même, autrement dit, quand il n’y a personne.

Man, attentif à l’environnement, n’a pas fait un seul bruit à l’approche des chevaux. Elsa a donc pu aller jusqu’au box de sa jument silencieusement, afin de se présenter dans les règles. Elle se plaça devant le box, à un mètre de la porte afin que ni Man, ni Spontaneous ne prenne peur, et sa racla la gorge.

« Hey ma Pocket, comment vas-tu aujourd'hui ? Et, pendant que j'y suis, je te présente Man, il sera ton nouveau copain. Enfin j'espère. »  

Spontaneous se rapproche et tend son museau le plus possible vers Man. Celui ci se colle à moi en la regardant, puis quand la jument se retire, il se calme. Je m'approche alors de quelques pas. Le chiot tremble toujours de peur, mais sa curiosité de bébé prend le dessus et il fini par tendre à son tour son museau vers l'équidé, la tête penchée à presque quatre-vingt-dix degrés.

« Vous vous dites bonjour, et ensuite on pourra commencer le pansage, d'accord ? »  

A l'approche du chiot, la jument relève brusquement la tête et recule, ne lâchant pas Elsa du regard. Man prend alors à son tour peur et se débat pour descendre des bras de sa maîtresse.

Elsa manque, elle, de lâcher le chiot suite à son sursaut. Mais elle se reprend bien vite, refoule son anxiété montante, et fini par afficher une sérénité à toute épreuve. Enfin un peu d'action, ne peut-elle s'empêcher de songer. Jusque là, la jument n'avait jamais réagit brusquement, ce qui était plutôt étrange pour une jument maltraitée. Ainsi, Elsa avait tout bonnement l’impression de tourner en rond. Là, elle avait enfin de la matière pour travailler efficacement sur les troubles de sa jument.

La rousse garde le chiot dans ses bras sans bouger, calme, soutenant en même temps le regard de la jument. Man continue de se débattre pendant plusieurs secondes puis, voyant que personne ne bouge, se détend. Elsa le caresse alors pour le féliciter, puis se concentre sur la jument.

« Tout le monde est calme, personne ne s’énerve, d'accord ? »  

La jeune femme plonge sa main dans sa poche et en sors une friandise. Elle la pose doucement sur le rebord de la porte et laisse sa main juste à côté, paume vers le ciel.

« Aller Pocket, viens la prendre. Tu n'as rien à craindre, ni de moi, ni de ma main, ni de Man. Personne ne te fera de mal, personne ne te tapera, personne ne te mordra. On est là pour s'amuser et s’entraider, pas vrai ? »  

La jument hésite, beaucoup, longtemps, puis décide de ne rien faire. Mais Elsa n'abandonne pas. Elle ne bouge pas de sa position, gardant sa main posée sur la porte du box, bien ouverte, paume vers ciel afin que la jument comprenne qu'elle n'est pas là pour la blesser. Le chiot, toujours dans ses bras, reste calme.

« Tu peux le faire ma belle. »  

Afin de faire monter l'envie et d'encourager la jument, la jeune femme prend une deuxième friandise dans sa poche, la pose à côté de la première, puis repose sa main sur la porte, mais un peu plus loin.

« Courage. »  

Spontaneous hésite encore, puis avance. L'une des friandises tombe au sol, mais la jument arrive à attraper la deuxième, relevant ensuite la tête pour regarder Elsa et Man.

La jeune femme se baisse doucement puis pose la friandise ramassée sur la porte du box avant de reculer de plusieurs pas.

« Et voilà Pocket, c'était aussi simple que ça. T'as vu ? Il ne s'est rien passé. »  

A présent placée à deux mètres du box, afin que la jument puisse souffler, Elsa reste immobile, caressant le chiot avec son pouce.

« Aller, on va commencer le pansage. »  

La rousse s'éloigne du box vers la porte de pansage. Elle pose le chien au sol et, avec la laisse, l'accroche à l'une des extrémités de la barre.

« Easy, boy. You don't move, okay?»  

Elle le caresse entre les oreilles puis va chercher sa boîte de pansage laissée dans son casier à la sellerie. Quand elle revient, le chiot est allongé par terre, à moitié endormi, profitant du soleil pour s'offrir une bonne séance de bronzage.

Elsa pose sa boîte devant la barre de pansage, se dirigeant ensuite vers le box de la jument avec seulement le licol en main. Elle passe sa main par dessus la porte du box et présente le licol à la jument.

« Alors, partante pour une bonne séance de brossage ? »  

La jument relève la tête et recule, surprise par le licol, mais se calme relativement vite et reprend une posture normal. Elsa lui sourit et sort une friandise de sa poche. Comme lors de leur première rencontre, elle se penche par dessus la porte du box pour la mettre dans la mangeoire.

« C'est bien Pocket, calme. »

La jeune femme se redresse et ouvre le loquet de la porte. Toute son attention portée sur les réactions de la jument, elle ouvre la porte et fait un pas à l’intérieur du box.

Elsa regarde Spontaneous lever la tête d'un seul coup mais ne s'arrête pas pour autant. Elle continue d'avancer, sachant que sa jument va se calmer, et c'est d'ailleurs ce qu'il se passe.

« C'est bien ma belle, t'es une bonne ponette. »

La jeune femme présente quelques secondes le licol à la jument puis le lui enfile doucement avant de faire sortir l'alezane de son box, réprimant son envie de lui flatter l'encolure. Elsa se dirige donc vers la barre de pansage, de l'autre côté d'où Man est attaché, détendue, mais tenant tout de même fermement la longe à deux mains afin de prévenir toutes réactions de fuite.